León, Poneloya et amis québecois

Découvrez nos aventures pour passer la frontière nicaraguayenne, rejoindre León puis Poneloya et sympathiser avec nos hôtes. Que de périple !

Jour 52.

On salue Serge et Robert. Sachant qu’on se reverra sans doute sur la route. On file au terminal de bus. Le chemin est simple jusqu’à la frontière hondurienne. On traverse tranquillement. Jusqu’au poste de santé. 

Premier problème. On a pas fait notre fiche. Quelqu’un de gentil nous la remplit sur son téléphone. On esquive cette partie assez facilement.

Vient alors le deuxième problème. Lors de notre première sortie du Honduras, on n’avait pas fait tamponner notre passeport. Et pour eux, ça veut dire qu’on n’est jamais sorti du territoire. Et comme on n’était jamais sorti du territoire, on peut pas re-rentrer. Le Honduras et le Salvador font parti du même accord en terme de visa. Donc c’est complètement stupide. Et puis, quand on a passé la frontière au Salvador ça n’a inquiété personne. Quoiqu’il en soit, malgré nos explications, ils veulent nous faire payer deux cents cinquante dollars pour cette infraction. Après négociations, on s’en sortira sans rien. Et en plus, maintenant, on a un passeport unique: avec deux tampons d’entrées au Honduras et un seul tampon de sortie !

Le trajet en bus, même s’il est court, pour accéder à la frontière nicaraguayenne, nous rappelle à quel point les honduriens sont adorables. Une dame avec laquelle on échangeait sur notre voyage nous paie même à manger dans le bus alors qu’on s’était à moitié endormi.

Et maintenant, la frontière nicaraguayenne. Déjà le paysage a changé. Il y a des gens à cheval. C’est pas signe d’un pays riche.

On se rend vite compte que traverser la frontière à pied, personne ne le fait. Tous les touristes sont en bus américains qui se chargent de toutes les formalités. 

Exemple d’un échange avec un policier:

– « Vous voyagez avec quelle compagnie ? »

– « Aucune »

– « Pas avec Tica bus ? »

– « Non, non, en chicken bus »

– « Mais vous traversez la frontière comment ? »

– « Bah à pied »

–  » Euh d’accord … Mettez-vous… Là… avec les Tica dans cette file… »

Bref 3h30 plus tard, nos passeports vérifiés, revérifiés, notre taxe d’entrée payée, nos bagages scannés, notre fiche d’entrée avec notre adresse de destination et nos informations personnelles remplie, puis vérifiée. Notre petit ticket qui confirme qu’on est bien vaccinés montré, ainsi que le tampon d’entrée checké, on peut enfin monter dans notre premier bus nicaraguayen. Le dernier qui va à Chinandega. On a eu chaud. Là, on est vraiment limite en cordobas. On n’en a pas changé beaucoup et on n’avait pas trop de monnaie. On serre les fesses.

Arrivée à León

19 heures, nuit noire. Le chauffeur de bus nous interpelle. Il veut savoir où on se rend. On comprend vite que pour la première fois de notre voyage, quand il fait nuit, même à 19h, il vaut mieux éviter de se balader. Il nous fait monter dans un taxi, l’hotel est à une rue, mais on ne va pas risquer nos vies. On n’a pas assez de sous pour manger donc, on fait avec ce qu’il nous reste, du riz nature et une chayotte cuite à l’eau. Note du repas 2/10. Après douze heures de bus, deux frontières et trois pays, on s’écroule.

Dans les rues de León

Jour 53 .

On part visiter le centre. León est une ville coloniale. C’est par excellence la ville libérale du Nicaragua, celle d’où a démarré la révolution dans les années quatre-vingt. Et on le sent bien à travers les fresques un peu partout dans la ville. 

La cathédrale est kitsch et bruyante. Par contre, si on prend le temps on peut visiter la trentaine d’églises qu’accueille la ville. Bien qu’officiellement, elle n’en recense « seulement » dix-sept. Lors d’un free-tour, on en apprendra sur le sacrifice d’un poète dans le théâtre de la ville pour assassiner l’ancien dictateur et permettre à Sandino d’accéder au pouvoir. Rubén Darío fera figure de martyr de la révolution sandiniste.

Cathédrale de León

Un tour au marché

On ira également au marché découvrir des spécialités locales, bizarroïdes. Définitivement, l’Amérique centrale n’est pas une terre de gastronomie. Une fausse copie de cheesecake nommée « pan de leche » est en fait l’idée qu’on a un d’un dessert au parmesan, d’une texture un peu semblable à un flan parisien, en beaucoup moins épais. C’est infâme.

On peut aussi goûter les « quesadillas de queso ». Quand on entend ça, on peut penser aux quesadillas mexicaines garnies de fromage fondu. Grossière erreur, malheureux ! C’est bien plus proche du quatre-quarts, au fromage frais acidulé, laissant un fort goût de lait caillé. C’est même pas sucré, ce qui rend la chose encore plus immangeable. Seul point positif, si tu as vraiment faim et rien d’autre, ça remplit l’estomac.

On finira sur un pilolillo. Ça, c’est bon ! Une sorte de porridge à la farine de maïs et à la cannelle.

Fresque sandiniste à León

Jour 54.

Il est l’heure de partir pour Poneloya.

On arrive devant le portail de nos hôtes, après une heure et demie de bus. On découvre, non sans surprise, un mot écrit en français avec un numéro de téléphone et le code du wifi pour les contacter. Deux minutes plus tard, un gros pick-up blanc surgit devant nous avec Roxanne au volant, notre première hôte. On comprend vite qu’elle est québécoise, d’où le mot en français.

On entre et là on rencontre notre deuxième hôte. Gaston. Un gros chien style pitbull, blanc et chocolat, en pleine fougue de jeunesse canine. Il saute dans tous les sens. Content d’avoir des amis.

Plus tard, notre troisième hôte pointera le bout de son nez. Patrick, lui aussi, est québécois. On va vite prendre l’accent à force. Mais bon, « c’est correc’, lô » !

Gaston, Patrick et Roxanne

Ils sont arrivés ici il y a deux ans. Juste après la révolte estudiantine réprimée par le pouvoir en place. Officiellement, 200 morts. Officieusement, 3000. On consacrera un article complet à la politique nicaraguayenne, tellement c’est le bordel.

Leur vie d’avant

On vous l’accorde, ce titre fait un peu film français pourri, plat et long à mourir. Mais on l’aime bien. Patrick était concepteur de piscine. C’est un véritable couteau suisse et rien ne l’arrête quand il s’agit de bricoler. Ils ont tout réaménager. D’ailleurs, ils sont encore en plein travaux mais ça leur plaît. Ils finiront par faire quelque chose qui leur ressemble avec un four à pain au feu de bois, une vraie cuisine, un brasero. « Parce que c’est leur projet ! » On s »égard.

Roxanne était ambulancière. Ils en avaient marre de l’augmentation du coût de la vie au Québec et de passer leurs jours à bosser sans réel but.

Ils avaient prévu d’acheter un camping au Costa Rica, tout était quasiment fait, les papiers n’avaient plus qu’à être signés. Puis la propriétaire leur a dit que ce n’était pas le terrain qu’ils voulaient qu’elle leur vendrait. Refroidis, ils s’en vont vers d’autres contrées et après un voyage au Nicaragua en 2017, ils décident que c’est ici qu’ils achèteront. A Poneloya, le village accolé à Las Penitas. 

C’est marrant parce qu’il y a un contraste fou entre les deux villages. Las Penitas est très touristique et créé de toutes parts pour accueillir des surfeurs, faire la fête. On y trouve de nombreux hôtels et auberges de jeunesse, un bar, deux ou trois restaurants. Bon, en ce moment c’est mort. On se remémore cette phrase de Roli au Honduras « il n’y a plus de backpackers ». Ça fait sens que ce soit un village fantôme, du coup.

Poneloya c’est l’inverse.

C’est tout mort. Un village de pêcheurs, très pauvre. Avec quelques maisons sur la plage qui appartiennent à des gens importants, comme des proches du pouvoir ou des expatriés. Puis il y a à l’arrière une sorte de ghettos, des maisons en tôles, des personnes qu’il ne faut pas montrer, qui vivent sans route bétonnée, au milieu de la mangrove et de ses canaux. 

Cependant, c’est l’ambiance qu’on préfère. Bien moins aseptisée, hors de sentiers battus. Ça permet aussi d’avoir la plage pour soi. Et quelle plage ! Des kilomètres et des kilomètres de sable, sans personne dessus. En plus, elle est globalement propre. 

Sauf tout au bout, à l’entrée du village par l’océan, à l’estuaire qui mène au port, là où l’eau s’engouffre entre deux dunes, il faut faire attention où l’on pose les pieds. Par terre, seringues et flacons jonchent le sol. Et oui, les signes de misère sont universels.